Le mardi 16 janvier 2018, le gouvernement américain a annoncé le gel de l’aide qu’il verse à l’UNRWA, l’agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens.
Jusqu’à présent, les Etats-Unis étaient les principaux bailleurs de l’agence, assurant le financement de 30 % des fonds. En 2017, l’aide américaine s’était élevée à 350 millions de dollars. En ce début d’année, la première tranche de l’aide, 60 millions de dollars au lieu des 125 millions qui étaient prévus, a été versée afin de maintenir les activités de l’UNRWA à court terme. Heather Nauert, la porte-parole du département d’Etat de l’administration Trump, a précisé que l’aide n’était pas annulée mais seulement gelée, et que cette mesure ne devait pas être interprétée comme une sanction à l’encontre des autorités palestiniennes, mais plutôt une invitation à réformer le fonctionnement de l’agence et à repartir plus équitablement son financement.
Le commissaire général de l’UNRWA, Pierre Krähenbühl a déclaré que cette décision marquait la plus grande crise financière de l’histoire de l’agence onusienne, qui accusait déjà un déficit de plus de 150millions de dollars. L’UNRWA a en effet la particularité de voir ses besoins croître chaque année à mesure que la population des réfugiés de Palestine augmente, les enfants de réfugiés étant également considérés comme des réfugiés. Sans cette aide, le maintien des activités de l’UNRWA est menacé. Pierre Krähenbühl alerte sur le risque de mettre fin à des services vitaux et nécessaires pour le maintien de la dignité des réfugiés palestiniens les plus vulnérables.
Cette actualité est relayée par le média IRIN news, plate-forme indépendante qui propose des informations sur les crises humanitaires afin d’initier des processus de réponses éclairés et plus efficaces.
Qu’est-ce que l’UNRWA ?
L’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) est un organisme de l’ONU fondé en 1949 pour répondre à l’afflux de réfugiés provoqué par la guerre qui a abouti à la création de l’Etat d’Israël. Elle apportait un soutien aux 700 000 personnes qui ont fui leurs territoires, la plupart vers des pays frontaliers, et ayant de ce fait perdu leur logement et leurs moyens de subsistance. Le mandat de l’UNRWA a été étendu à la suite de la guerre de 1967, avec l’occupation par l’armée israélienne de la Cisjordanie, de la bande de Gaza, du Sinaï, du Golan et de Jérusalem-Est.
Aujourd’hui, l’organisme a la charge de plus de 5 millions de personnes enregistrées comme réfugiés de Palestine et intervient principalement en Cisjordanie, en Jordanie, au Liban, en Syrie et dans la bande de Gaza. Elle fournit une assistance dans les domaines de l’éducation, de la santé, la sécurité alimentaire et la gestion de certains camps de réfugiés. Sa vocation est fondamentalement humanitaire.
Le gel partiel de l’aide américaine souligne l’extrême dépendance de l’agence vis-à-vis des Etats membres, la décision de soutenir financièrement une agence onusienne humanitaire étant laissée à la discrétion de chacun et n’ayant pas de caractère systématique ou contraignant.
Le secteur éducatif, pilier de l’agence
Le secteur éducatif représente une part très importante des actions menées par l’UNRWA. Elle est notamment responsable de l’éducation de 525 000 jeunes palestiniens et palestiniennes scolarisés dans les quelques 700 écoles qu’elle gère, sans compter les projets éducatifs indépendants qu’elle soutient. Elle assure ainsi un accompagnement scolaire pour les jeunes de l’école élémentaire à l’université. L’éducation représente d’ailleurs le principal secteur de dépenses de l’agence sur tous les territoires où elle intervient, hormis en Syrie où la situation de guerre fait passer les services d’assistance socio-sanitaire en première place.
Les craintes suscitées par la possible déscolarisation de jeunes Palestiniens
L’investissement de l’UNRWA dans le secteur éducatif fait écho à l’une de ses raisons d’être : la paix et la stabilité au Proche-Orient. Face aux crises et conflits qui se multiplient dans la région, la situation de la jeunesse est l’un des principaux éléments à prendre en compte pour espérer l’atténuation du cercle engendré par la violence.
La jeunesse est un enjeu principal du développement pour les réfugiés palestiniens. En 2012, un tiers de la population avait moins de 19ans, et l’âge médian était de 20ans. Dans ce contexte, la lutte contre la déscolarisation et le chômage apparaissent comme l’ultime sortie de secours pour offrir des perspectives à cette jeunesse. Priver ces jeunes d’éducation scolaire à cause d’une coupe dans les finances de l’agence représenterait une atteinte de plus faite à leurs droits et donc une source de frustration supplémentaire. Le commissaire général de l’UNRWA craint ainsi que le gel des finances américaines n’expose davantage cette part de la population déjà vulnérable aux dangers de la radicalisation que l’agence est parvenue à contenir. Selon Pierre Krähenbühl, la confiance des jeunes palestiniens en l’avenir ne pourra être assurée que si le niveau d’éducation, l’un des plus fort au Proche-Orient, est maintenu.
Image : UNRWA School, By ISM Palestine, Flickr, CC BY-SA 2.0