Depuis sa naissance en Iran au XIXè siècle, la foi baha’ie, issue d’une mouvance chiite messianique, a été persécutée en raison de croyances considérées hérétiques et de lieux saints situés en Israël. Au lendemain de l’instauration de la République islamique en Iran en 1979, la répression envers les fidèles de cette doctrine monothéiste s’est généralisée à travers l’ensemble de la région.
Au Yémen, dans un contexte de guerre civile internationalisée depuis 2015, les arrestations arbitraires n’ont ne cesse de croître depuis la prise de contrôle de la capitale Sanaa par les rebelles Houthis se revendiquant de la communauté chiite zaïdite. L’organisation internationale non-gouvernementale The Baha’i International Community (BIC) revient sur les discriminations de plus en plus généralisées subies par les membres de cette communauté de croyants.
Une minorité religieuse accusée de tous les maux
Le 23 mars 2018, à l’occasion de la célébration de l’arrivée de la religion musulmane au Yémen, le chef des Houthis et de sa branche politique Ansarullah a ouvertement incité à la haine envers la communauté baha’ie. Dans une allocution télévisée dont l’audience dépasse les frontières, Abdul-Malik al-Houthi a repris le vocabulaire diabolisant employé par les deux Guides de la Révolution qui ont dirigé l’Iran depuis 1979. Il a entre autres accusé les fidèles baha’is de promouvoir, par leur « mouvement satanique », une « guerre doctrinale contre l’Islam ». Afin d’encourager la population à marginaliser cette minorité religieuse, il n’a pas hésité à la déclarer aussi dangereuse que « ceux qui tuent avec des bombes ».
Intolérance assumée et systématique
Ce message d’intolérance est d’autant plus inquiétant qu’il a été relayé et accentué par des autorités religieuses, des figures politiques proéminentes ainsi que des membres de la société civile. Ainsi, le grand mufti du Yémen a porté les mêmes accusations alarmantes sur la prétendue menace baha’ie, tandis que le Ministère de l’Information a organisé des ateliers dans les universités à travers le pays pour former à la propagande anti-baha’isme. Un exemple particulièrement préoccupant de l’usage des médias pour atteindre un large public est celui d’un programme télévisé qui a ouvert une chasse à l’homme morbide en consacrant un épisode à la délation de fidèles.
L’invitation au génocide appelle à de fermes condamnations internationales
Selon la représentante principale de la communauté baha’ie aux Nations Unies, le discours de Abdul-Malik al-Houthi et la rhétorique adoptée par son organisation sont des « appels directs aux atrocités de masse contre une minorité religieuse procédant d’une intention génocidaire ». A ce titre, elle appelle la communauté internationale à prendre les actions nécessaires à la protection de ce groupe systématiquement persécuté. Rappelons que toutes les assemblées baha’ies ont été dissoutes et qu’Hamed Haydara est condamné à mort en raison de ses convictions et de son activisme pacifique.
Il est toutefois important de souligner que cette intolérance n’est pas partagée par toute la population yéménite, ni même par tous les Houthis. De plus, la généralisation de ces actes d’injustice semble encouragée par l’Iran chiite qui mène également une campagne domestique d’oppression contre le mouvement.
Image : Visit to the Baha’i World Center, By US Embassy Jerusalem, Flickr, CC BY-SA 2.0