Un article paru le 8 janvier, le site Religion News Service (RNS), une source indépendante d’information sur la religion dans le monde, présente le cas de Badr Baabou, activiste de 39 ans pour les droits LGBT en Tunisie, engagé dans ce combat depuis 2002.
Dans celui-ci, M. Baabou parle de sa dévotion envers la sainte soufie Aisha Al-Manoubya (« sainte médiévale du XIIIe siècle, née en Tunisie dans un village proche de Tunis, La Manouba »). Ce dernier s’identifie spirituellement à l’engagement de cette sainte, considérée comme une féministe pionnière, qui défendait les droits des plus pauvres et des plus marginalisés en défiant les standards sociaux de son temps. En effet, à l’image de cette sainte, le soufisme en Tunisie est souvent compris en opposition au salafisme. Si le premier est souvent soutenu par des acteurs prônant le modernisme et la sécularisation, le deuxième est considéré comme un courant conservateur et arriéré importé des pays du Golfe. Ainsi, M. Baabou se reconnaît dans cette sainte pour son humanisme et son avant-gardisme qui dépassent les diktats de la société et lui ont valu le respect de ses fidèles. C’est dans cette veine spirituelle que M. Baabou inscrit son combat.
M. Baabou est originaire de la ville de Gabès au sud de la Tunisie. Ce dernier est président et cofondateur de Damj (qui veut dire inclusion), l’Association Tunisienne pour la justice et l’égalité qui existe depuis 2011. Cette association propose un conseil et soutien juridique, psychologique, médical, de l’assistance humanitaire, un travail de lobbying auprès d’acteurs locaux, régionaux et internationaux, pour les victimes d’agression ou d’intimidation sur la base de leur orientation sexuelle.
À cause de son engagement, M. Baabou a été victime d’attaques physiques et de Cyber intimidation. En 2016, il a été violemment frappé par trois hommes masqués qu’il suspecte d’être soutenus par le gouvernement. Ils n’ont pas été identifiés, ni condamnés. Le 9 juillet 2018, sa maison, qui fait aussi office de bureau de l’association, a été cambriolée. Selon un rapport de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, des ordinateurs et disques durs auraient été volés contenant des données sensibles relatives au travail de l’association. Ces dernières années, M. Baabou et ses collègues de l’association auraient été souvent victimes de harcèlement de la part de la police, des services de sécurité, mais aussi de personnes lambda qui, en agissant de la sorte, ne s’exposent à aucune punition. De plus, M. Baabou déclare être au courant d’une forme d’espionnage de la part de groupes officieusement soutenus par la police, l’obligeant à changer de domicile fréquemment ou bien à utiliser des messageries protégées.
En dépit de ces difficultés, M Baabou reconnaît aussi un nouvel espoir pour la communauté LGBT depuis la révolution de 2011. En effet, de nombreuses associations ont vu le jour et des événements sont souvent organisés permettant de mettre en lumière les revendications de cette communauté. Grâce à ces actions, M. Baabou a reçu en 2019 le prix “Front Line Defenders Award for Human Rights Defenders at Risk” de l’association Front Line Defenders (une organisation irlandaise de défense des droits de l’homme fondée à Dublin, en Irlande, en 2001) qui récompense les militants qui œuvrent pour la défense des droits LGBT.
Image: Badr Baabou (Mitbegründer und Vorsitzender der tunesischen Organisation Damj, Tunesien) , vor einem Foto von Robin Hammond, Foto: Bodo Gierga by Heinrich-Böll-Stiftung, Wikimedia Commons CC BY 2.0