Le 24 novembre 2020, le tribunal de Tizi-Ouzou, en Grande Kabylie, a convoqué trente-et-un Algériens de confession ahmadie.
Les ahmadis se considèrent comme musulmans alors que la majorité des musulmans les excommunie. Selon leur doctrine, leur fondateur, Mirza Ghulam Ahmad (1835-1908) né en Inde, est à la fois le messie (chrétien) et le mahdi (musulman). En Algérie, ils sont apparus sur la scène médiatique en 2016, lors d’une campagne d’arrestations.
Selon leurs avocats, Me Houali et Me Dekkal, ils seraient accusés de plusieurs infractions :
- diffusion de tracts dans le but de porter atteinte à l’intérêt national (article 96 du Code pénal)
- pratique d’un culte dans un lieu non destiné à cet effet (loi de 2006 relative aux cultes autres que musulman),
- collecte de fonds et de dons sans autorisation (ordonnance de 1977 relative aux quêtes),
- prêche à l’intérieur d’une bâtisse sans autorisation et sans agrément (article 87 bis 10 du Code pénal).
Le 15 décembre, le procureur a requis trois ans de prison ferme pour trois des accusés et 18 mois pour les 28 autres. Les prévenus présents à l’audience, ont assumé leur appartenance au courant religieux ahmadi. Toutefois, ils ont nié avoir organisé des prêches à l’intérieur des locaux de l’association caritative El Amane. Interrogés au sujet de leurs activités au sein de l’association, ils ont répondu au juge : « Nous n’avons jamais réservé le siège de notre association à des prêches religieux, même si parfois nous organisions à l’intérieur des locaux des débats dont le thème central est en relation avec le courant religieux les ahmadis.»
Un des prévenus a également déclaré que, selon lui, l’islam et l’ahmadisme étaient synonymes.
Le 22 décembre, le tribunal de Tizi-Ouzou a condamné quatre des prévenus à deux mois de prison avec sursis et 20 000 Dinars algériens (DA) d’amende. Les 27 autres ont été relaxés.
Ces condamnations viennent s’ajouter aux nombreuses condamnations précédentes visant les ahmadis en Algérie. Les avocats des accusés, maîtres Houali et Dekkal, considèrent ce procès comme une énième atteinte à la liberté de culte.
Ces condamnations s’expliquent par la volonté de l’État algérien de contrôler le champ religieux. Elles confirment l’obsession de l’État de construire un référent national religieux fondé sur une doctrine, à savoir le malékisme. Tout ce qui serait d’inspiration étrangère est perçu comme dangereux pour l’unité nationale.
Image : Drapeau du courant ahmadiyya