Vendredi 12 Mai, les principales forces politiques du Myanmar ont trouvé un accord visant à permettre aux différentes Régions et Etats du pays de rédiger et d’adopter leur propre constitution. Cet accord de principe est conditionné par l’engagement des groupes minoritaires à renoncer à toute revendication sécessionniste. Pour être effectif, cet accord devra être inscrit dans l’accord de paix final, avant d’être approuvé par le Parlement.
C’est le premier compromis majeur trouvé entre le gouvernement d’Aung San Suu Kyi, l’armée, et les milices ethniques depuis le début du processus de paix engagé en Octobre 2015. Interrogés à la sortie des négociations, des représentants de groupes armés ont qualifié cet accord d’historique, y voyant un succès significatif pour les minorités ethniques qui militent pour obtenir une plus grande autonomie politique au sein d’un véritable système fédéral.
Dans ce pays de 52 millions d’habitants, la communauté Bamar représente deux tiers de la population et domine depuis des décennies la vie politique et économique. La majorité Bamar vit dans les 7 Régions qui composent le centre du pays. Les 17 autres millions d’habitants se composent d’ethnies minoritaires vivant dans 7 Etats situés sur le pourtour périphérique du pays. Ces groupes luttent depuis plus de 60 ans pour obtenir un partage du pouvoir politique plus équitable. La monopolisation du pouvoir politique par la communauté Bamar est aujourd’hui institutionnalisée dans la constitution fédérale de 2008. Rédigée par l’armée, cette constitution octroie la plupart des compétences législatives et fiscales au gouvernement fédéral, au détriment des gouvernements des Régions et des Etats.
Certains acteurs locaux ont toutefois émis de sérieuses réserves quant aux bénéfices concrets que l’accord du 12 mai pourra apporter aux Etats ethniques. Plusieurs membres de groupes rebelles, non signataires de l’accord de cessez-le-feu national, considèrent ainsi qu’octroyer le droit aux Etats et Régions de se doter de leur propre constitution ne permettra pas de rééquilibrer le partage du pouvoir entre le gouvernement fédéral et les gouvernements des Etats et Régions. Selon eux, seul un amendement majeur de la Constitution fédérale de 2008 permettrait de transférer des domaines de compétences et des ressources fiscales du centre fédéral vers les gouvernements des Etats et Régions, et ainsi d’accroître l’autonomie politique de ces derniers.
Alors que cet accord semble diviser certains groupes ethniques, il semble mettre en scène l’aptitude du gouvernement à négocier et aboutir à des réformes symboliques aux yeux du grand public. Ce compromis pourrait ainsi renforcer la confiance et le soutient de la société civile envers un processus de paix qui semblait jusque là mal embarqué. Enfin, c’est aussi un signe du gouvernement envoyé aux groupes rebelles refusant de signer l’accord de cessez-le-feu que de réelles négociations ont commencé sans eux.
Image : Zi Jian Lim