L’accueil réservé aux réfugiés nigérians au Cameroun mais aussi dès le retour au Nigéria inquiète de Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), une agence onusienne spécialisée dans la protection des réfugiés.
Les exactions du groupe terroriste Boko Haram au Nigéria ont entrainé une ruée des refugiés nigérians au Cameroun. Plus de 90 000 selon le HCR, entrés par les localités de la région de l’Extrême-nord du Cameroun (Kewara, Amchidé, Fotokol, Tourou, Mogodé), principalement concentrés dans le camp de Minawao (qui en accueille plus de 59 000 depuis juillet 2013 contrairement à sa capacité d’accueil qui n’est que de 30 000 places) et les villages voisins qui abritent près de 33 000 réfugiés.
Ceux qui sont installés dans le camp de Minawao vivent dans des conditions très difficiles, ils se nourrissent difficilement et sont confrontés à des pénuries d’eau. Résignés et mal informés sur la situation dans leur pays, certains (environ 13 091) ont tenté entre avril et juin 2017 de regagner les villes de Banki et Pulka qui connaissent pourtant un chaos humanitaire. Ces derniers mois, l’inflation des attaques terroristes dans le Mayo Sava (département de l’Extrême-nord Cameroun qui abrite une trentaine de sites d’hébergement spontanés de réfugiés) a renforcé les suspicions à l’égard des refugiés nigérians, ouvrant parfois sur des amalgames.
Aux difficultés de survie s’ajoutent les risques de stigmatisation
A ces amalgames, s’ajoute le poids devenu insupportable des dépenses liées à la prise en charge des réfugiés. Le Cameroun est le 7e pays africain et 13e mondial à abriter le plus grand nombre de réfugiés, qui représentent 2 % de sa population et exercent une forte pression sur le budget de l’Etat. Environ 373 000 réfugiés et demandeurs d’asile sont accueillis au Cameroun dont 260 000 Centrafricains, 90 000 Nigérians et 20 000 réfugiés urbains. Une charge importante qui nourrit de plus en plus une certaine hostilité vis-à-vis de cette minorité meurtrie par la guerre.
De janvier à juin 2017, environ 4 317 d’entre eux auraient été reconduits de force à la frontière par les services de sécurité camerounaises (communiqué du HCR du 14 juillet 2017). Aux dures conditions auxquelles ils sont confrontés dès leur retour au Nigéria, s’ajoutent le traitement indécent qu’ils reçoivent de la part de l’armée nigériane qui les soupçonne de complicité avec Boko Haram.
Une telle considération pourrait figer leur frustration et faire le lit de l’extrémisme violent. Le discours de Boko Haram pourrait à moyen terme rencontrer un écho particulier auprès de cette cible vulnérable. La mouvance islamiste aurait même déjà infiltré ces communautés pour engager une campagne de retournement puisqu’environ neuf présumés combattants de Boko Haram et cent complices, infiltrés au sein de ces réfugiés venant du Cameroun ont été interpellés au début du mois de juillet selon Ahmed Satomi, directeur de l’Agence de gestion des urgences pour l’Etat du Borno.
Image : By VOA – 1, Public Domain