En juillet 2017, Carlos Simão Matsinhe, évêque de l’Église anglicane de Lebombo (sud du Mozambique), a parlé d’éducation à l’inclusion lors d’un séminaire du laboratoire d’idées Chatham House (Londres). Le sujet était « Réconciliation et reconstruction au Mozambique : le rôle de l’Église anglicane ».
L’évêque s’est félicité du maintien de l’accord de paix depuis 2014. Il a cependant souligné que la légitimité des dernières élections a été contestée. Il a appelé à l’éducation à l’inclusion au sein de la population pour renforcer la cohésion sociale et prévenir de nouvelles crises. L’évêque a rappelé que, dans toute démocratie, la population s’attend à voir le gouvernement changer de mains au gré d’élections libres et justes. Or, au Mozambique, le parti au pouvoir (le FRELIMO) est sorti vainqueur des quatre derniers scrutins. Ce manque d’alternance interroge sur la validité des élections.
L’Église anglicane mozambicaine, ainsi que d’autres Églises et des organisations religieuses de médiation, travaillent à promouvoir une « culture de paix ». Elles contribuent à l’éducation à l’inclusion défendue par Carlos Simão Matsinhe. Elles cherchent aussi à faire mettre en pratique l’accord entre le parti au pouvoir et l’opposition (la RENAMO).
Des racines anciennes
Rompant avec l’accord de 1992 qui avait mis fin à 16 années de guerre civile, le Mozambique a connu un regain de violences entre 2013 et 2014. À cette époque, les affrontements ont repris entre le parti au pouvoir (FRELIMO) et l’opposition (RENAMO).
La division entre les populations pro-RENAMO et pro-FRELIMO scinde le pays, peu ou prou, entre Nord et Sud. Le conflit s’est concentré dans les bastions de la RENAMO. Il a provoqué des déplacements de populations dans plusieurs régions centrales et nord du pays.
En septembre 2014, un accord a été signé entre le gouvernement et la RENAMO (via son chef Afonso Dhlakama). Il a été approuvé par le Parlement. Cependant, il n’a pas été mis en pratique. Cela a provoqué de nouveaux affrontements et déplacements de populations. De plus, le résultat des élections présidentielles d’octobre 2014 (remportées par le FRELIMO) a été contesté par l’opposition. A. Dhlakama a un temps menacé de scinder le pays en deux. La mission d’observation de l’application de l’accord et des élections (EMOCHM) a reconnu des irrégularités, mais a échoué à faire s’entendre les deux camps.
Des affrontements qui perdurent
Filipe Nyusi (élu président) et Afonso Dhlakama ont tenté de renouer le dialogue. Cependant, depuis 2015, plusieurs postes de l’opposition ont été attaqués et Afonso Dhlakama a échappé a plusieurs embuscades. Des manifestations pro-RENAMO ont été bloquées par les forces de police. La RENAMO a réarmé des milices. Des villages entiers ont été brûlés, faisant fuir les populations des bastions des deux camps, au nord et au sud du pays (notamment les provinces de Tete, Sofala, Gaza et Nampula). En 2016, le HCR de l’ONU dénombrait plusieurs milliers de réfugiés au Malawi voisin.
Les journalistes en difficulté
Les tensions sont bien visibles pour les journalistes, qui dénoncent par ailleurs des entraves à la liberté d’information. Plusieurs journalistes mozambicains accusent le FRELIMO de les empêcher d’enquêter sur ses activités. Ils dénoncent des intimidations et des difficultés pour ceux qui rapportent les activités de la RENAMO.
Note: FRELIMO (Front de libération du Mozambique), RENAMO (Résistance nationale mozambicaine)
Image : Signature de l’accord de paix entre A.Dhlakama et le président Armando Guebuza, 2014 Voice of America, Public Domain, Wikicommons