La présidence tunisienne a annoncé, le 14 septembre 2017, l’annulation des circulaires interdisant le mariage des femmes tunisiennes avec des non-musulmans. Quelle est la position des voisins algériens vis-à-vis de cette annulation ? Quelle est leur position vis-à-vis du mariage de la musulmane avec un non-musulman ? Serait-il envisageable d’avoir une abrogation similaire en Algérie ? Un journaliste a interrogé quelques Algériens pour avoir leur avis.
Le mariage des Tunisiennes avec des non-musulmans officiellement autorisé
Les circulaires d’interdiction d’un tel mariage dataient de 1962 et de 1973. La première interdisait à l’officier d’état civil ou au notaire de célébrer un mariage entre une musulmane et un non-musulman. La seconde se basait sur l’interprétation de l’article 5 du Code du statut personnel afin de considérer la disparité de culte comme un empêchement charaïque (basé sur la charia, la loi islamique). Toutefois, la jurisprudence tunisienne avait effectué un revirement. En 1999, le tribunal de première instance de Tunis avait considéré que l’article 5 renvoyait aux empêchements légaux et non charaïques. Cette décision a été confirmée par la Cour de Cassation tunisienne. Qu’en est-il du côté algérien ?
Le mariage des Algériennes avec des non-musulmans interdit en Algérie
L’article 31 de l’ancien Code de la famille, de 1984, disposait que : « la musulmane ne peut épouser un non-musulman ». Lors de la réforme du Code, en 2005, cet article a été abrogé. Néanmoins, l’article 30 cite le mariage de la musulmane avec le non-musulman au titre des empêchements temporaires. Ainsi, tant qu’un étranger ne se sera pas converti à l’islam, il ne pourra épouser une Algérienne. Rappelons que les Algériens sont considérés musulmans de naissance. Par ailleurs, rien dans le Code de la famille actuel ni dans l’ancien code ne prévoyait un empêchement au musulman d’épouser une non-musulmane ou non kitabia (une femme d’un Livre révélé, une chrétienne ou une juive).
L’avis mitigé des Algériens face à l’autorisation d’un tel mariage
Interrogés sur l’autorisation du mariage de la musulmane avec le non-musulman, les réponses divergent. Certains considèrent qu’il s’agit d’un choix libre. Chacune devrait pouvoir épouser la personne qu’elle souhaite. D’autres rappellent que malgré l’interdiction, les fausses conversions à l’islam se multiplient. D’après Salima, responsable d’un bureau d’affaires, «il est impératif, pour le salut de la société algérienne, que la femme obtienne ses droits les plus fondamentaux : épouser celui qu’elle désire serait déjà un bon début ». De plus, certains rappellent que les sociétés tunisiennes et algériennes sont différentes. La Tunisie étant un pays touristique, les Tunisiens sont en contact permanents avec des étrangers.
D’autres avancent l’argument religieux et refusent le débat. « Dieu a tranché », il a interdit un tel mariage. Toutefois, est-il possible de leur proposer une nouvelle lecture des versets coraniques ? Une lecture selon le contexte de leur révélation. Une lecture qui rappellerait que le terme mouchrik en arabe signifie associassioniste et qu’un non-musulman n’en est pas forcément un.
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