Delta Blues

L’auteur

Né en 1977, Julien Delmaire est romancier et poète français. Il est à l’origine de sept recueils de poésie et de quatre romans.

Résumé

L’intrigue du roman se déroule dans une petite ville fictive du delta du Mississippi, en pleine Grande Dépression. La chronologie du roman s’étend du début des années 1930 jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. La narration s’attache à un éventail de personnages de fiction telle Betty, lavandière noire, nièce de la féticheuse Saphira et son conjoint Steve, Dora, une prostituée douée d’une voix extraordinaire et son fils Joshua, ou encore, Legba, divinité vaudou ; ou inspirés de personnages historiques tel le bluesman Bobby (Robert) Johnson ou Willie Brown. Les intrigues multiples portées par la narration se déroulent sur fond d’assassinats nocturnes inexpliqués.

Approche du pluralisme culturel et religieux 

Deux axes principaux se dégagent du récit. D’un côté, la conflictualité des rapports raciaux hérités de la période esclavagiste est bien visible avec notamment le personnage de James Conrad, planteur et chef de district du Ku Klux Klan. De l’autre, les références à l’univers musical du blues sont omniprésentes allant de personnages de grands bluesmen fictionnalisés tels Bobby (Robert) Johnson, guitariste de génie, à de nombreux passages de chansons retranscrits en français.

C’est véritablement la capacité de l’auteur à multiplier et croiser les destins des différents personnages qui fait la vitalité du roman, ceux-ci évoluant parallèlement dans des univers raciaux et sociaux opposés et pourtant très proches géographiquement. Julien Delmaire parvient à reconstituer minutieusement le microcosme de cette petite ville rurale cloisonné de toute part en conférant au lecteur un point de vue omniscient. Autre point d’intérêt du roman, sa manière de représenter la superposition d’une foi évangéliste dominante au système de croyances afro-américain rescapé des religions du golfe de Guinée et désigné sous le terme de hoodoo. Cette coexistence des spiritualités fait écho à celle des castes raciales et des différents réseaux de solidarité du sud.

L’auteur utilise la musicalité comme trame de fond pour faire plonger le lecteur au cœur du quotidien sacré (chants vaudous) et profane (work songs, riffs de guitare blues). Il utilise aussi différents registres de langue, tantôt issus du parler populaire du sud des États-Unis, tantôt issus du registre poétique. La force du livre réside dans la crédibilité de cet effort de reconstitution fictive où les efforts de licence romanesque permettent cependant d’apprécier l’ouvrage à la manière d’un conte.

Pour aller plus loin 

Pour aller plus loin, on pourra lire ou relire l’excellent roman de William Styron, Les confessions de Nat Turner, lui aussi inspiré de figures historiques empêtrées dans les rapports de domination du sud esclavagiste de 1831.

Par Léonard Martorello