Covid-19 / Contrôle des médias et réseaux sociaux par la majorité au pouvoir / Fragilisation de la figure de Modi / Chrétiens de l'ethnie Mizo en fuite du Myanmar vers l'État du Mizoram / Plainte contre l'association Hindus for Human Rights déposée par l'Hindu American Foundation
 
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VEILLE PHAROS / INDE
1er juin 2021
 
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L’Inde a franchi la barre des 300 000 morts la semaine dernière, et la pandémie ne semble pas faiblir en dépit des mesures de couvre-feu ou de confinement. Des centaines de corps soupçonnés d’être infectés par la covid-19 ont été repêchés dans le Gange, notamment dans l’Uttar Pradesh et le Bihar, témoignant de l'explosion de la pandémie dans les zones rurales. Ces images terrifiantes viennent également soutenir l’hypothèse d’une sous-évaluation des cas par les autorités et d’une volonté de minimiser l’ampleur de la crise sanitaire. Le gouvernement Modi tente notamment de contrôler les réseaux sociaux à travers une nouvelle législation de surveillance des messages chiffrés. Les bureaux de Twitter ont été également perquisitionnés après que la plateforme a signalé le tweet d’un leader du BJP comme « manipulé ». Ces atteintes à la liberté d’expression et à la vie privée témoignent de la crainte de Modi de perdre le contrôle de son image de dirigeant fort. Cette seconde vague a non seulement révélé les fragilités et ambivalences du gouvernement populiste de Modi, mais participe également à fragiliser son propre parti ainsi que son allié, le RSS.

India crossed the 300,000 death mark last week, and the epidemic does not seem to be slowing down, despite local curfew or containment measures. Hundreds of suspected Covid-19 infected bodies have been recovered from the Ganges River, particularly in Uttar Pradesh and Bihar, showing the explosion of the pandemic in rural areas. These terrifying images also support the hypothesis that the authorities have underestimated the number of cases and that there is a marked desire to minimize the extent of the health crisis. Modi’s government is trying to control social networks through a new legislation monitoring encrypted messages. Twitter's offices were also raided after the platform reported a BJP leader's tweet as "manipulated". These attacks on freedom of expression and privacy reflect Modi's fear of losing control of his image as a strong leader. This second wave has not only revealed the fragilities and ambivalence of Modi's populist government, it is also undermining his own party and its ally, the RSS.

 
 

Info phare - Source médiatique

 
 

L’amendement à la loi sur la citoyenneté indienne mis en application dans cinq États

Alors que les spécifications juridiques de l’amendement controversé à la loi sur la citoyenneté indienne adopté en décembre 2019 n’ont pas encore été déterminées à l’échelle fédérale, le gouvernement indien a publié un décret dans son journal officiel, afin d’autoriser l’application de cet amendement dans 13 districts des États du Gujarat, Chhattisgarh, Rajasthan, Haryana et Pendjab. Les chefs administratifs (district collectors) des districts pourront recevoir et valider les demandes de nationalité d’hindous, sikhs, bouddhistes, jaïns, parsis ou chrétiens, mais pas des musulmans, venant d’Afghanistan, du Pakistan et du Bangladesh.

Citizenship Amendment Act implemented in 5 states


While the legal specifications of the controversial Citizenship Amendment Act passed in December 2019 have yet to be determined at the federal level, the Indian government has issued an order in its official gazette to give permission for the amendment to be implemented in 13 districts of the states of Gujarat, Chhattisgarh, Rajasthan, Haryana and Punjab. The district collectors will be able to receive and validate applications for nationality from Hindus, Sikhs, Buddhists, Jains, Parsis and Christians – but not Muslims - from Afghanistan, Pakistan and Bangladesh.

 
 

Sources médiatiques

 
 

Les conséquences sanitaires du Kumbh Mela

Le quotidien anglais The Guardian consacre un article sur le pèlerinage hindou du Kumbh Mela qui s’est tenu à Haridwar, et ses conséquences sanitaires dans le pays, après que les pèlerins soient retournés dans leurs États respectifs. À travers le récit de plusieurs personnes, cet article révèle l’ampleur des contaminations dues à cet évènement religieux.

The health consequences of the Kumbh Mela

The English daily newspaper The Guardian devotes an article to the Hindu Kumbh Mela pilgrimage held in Haridwar, and its health consequences in the country, after pilgrims returned to their respective states. Through the accounts of several people, this article reveals the extent of contamination due to this religious event.

 
 

La pandémie a suscité un nouvel élan de solidarité interreligieuse en Inde

De nombreux Indiens se sont retrouvés désemparés face à l’ampleur de la crise et l’absence de mesures des autorités publiques. Cette situation a mis en évidence les cercles de solidarité interreligieuse, comme l’illustrent les musulmans aidant aux rites funéraires hindous, ou les temples sikhs accueillant des patients de toute confession pour leur fournir de l’oxygène.

The pandemic has allowed for a return to inter-faith solidarity in India

Many Indians found themselves helpless in the face of the magnitude of the crisis and the lack of action by public authorities. This situation has highlighted inter-faith solidarity circles, such as Muslims helping with Hindu funeral rites, or Sikh temples taking in patients of all confession, to provide them with oxygen.

 
 

Les croyants parsis refusent la crémation des victimes de la covid-19

Dans l’État du Gujarat, les croyants de la religion parsie ont déposé un recours en justice contre les crémations des victimes de la covid-19, une pratique contraire à leur croyance. Ils attendent des autorités des instructions leur permettant de réaliser les rituels funéraires en accord avec les traditions religieuses zoroastriennes.

Parsi believers refuse cremation of Covid-19 victims


In the state of Gujarat, believers of the Parsi religion have filed an appeal against cremations of Covid-19 victims, a practice contrary to their belief. They asked the authorities for directions to carry out the funeral rituals in accordance with the Zoroastrian religious traditions.

 
 

Désillusions dans les rangs du RSS et du BJP suite à la mauvaise gestion de l’épidémie

La peine causée par la perte de proches décédés de la covid-19 et l’inaction du gouvernement Modi face à la seconde vague de l’épidémie sont autant d’éléments de fragilisation des soutiens au Premier ministre au sein de son propre parti et du RSS. Ce mécontentement face à un leader ayant donné priorité aux élections au détriment de la santé publique transcende les appartenances religieuses ou de castes.

Disillusionment in RSS and BJP ranks over mismanagement of epidemic


The grief over the loss of loved ones to Covid-19 and the Modi government's inaction in dealing with the second wave of the epidemic are undermining the Prime Minister's support within his own party and the RSS. This discontent with a leader who has prioritized elections over public health transcends religious and caste affiliations.

 
 

Whatsapp porte plainte contre les lois de surveillance des médias

L’application de messagerie chiffrée Whatsapp a déposé plainte contre les nouvelles lois sur l'information et la technologie donnant la possibilité au gouvernement indien de surveiller les réseaux sociaux, y compris les messageries chiffrées Whatsapp et Signal. Ces lois imposeraient aux messageries d’enregistrer les messages dans une base de données afin qu’ils soient accessibles au gouvernement pour détecter des contenus illicites. Cette plainte est une première en Inde, alors que le gouvernement Modi renforce ses mesures de contrôle sur les réseaux sociaux et messageries chiffrées.

Whatsapp files suit against media surveillance laws


Encrypted messaging app Whatsapp has filed a complaint against new IT laws that give the Indian government the ability to monitor social networks, including encrypted messengers Whatsapp and Signal. These laws would require messengers to record messages in a database so that they can be accessed by the government to detect illegal content. This complaint is a first in India as Modi’s government strengthens its control measures on social networks and encrypted messaging.

 
 

Les bureaux de Twitter Inde perquisitionnés par la police

Un tweet d’un leader du BJP a accusé le parti d’opposition du Congrès d’avoir créé un kit de communication afin de diffuser de fausses informations sur la pandémie en Inde. Ce tweet a été signalé par Twitter comme « manipulé », suite à une plainte du Congrès, et la police a perquisitionné quelques jours plus tard les bureaux de Twitter Inde, vidés de ses employés. Cette descente de police est perçue comme une intimidation de la part du gouvernement Modi, ne tolérant plus les critiques à son encontre.

Twitter India offices raided by police

A tweet from a BJP leader accused the opposition Congress party of creating a communication kit to spread false information about the pandemic in India. The tweet was flagged by Twitter as "manipulated", following a complaint from the Congress, and police raided Twitter India's offices a few days later, which was empty of its employees. This police raid is perceived as an intimidation by Modi’s government, which is no longer tolerant of criticism against it.

 
 

Préserver l’image internationale de l’Inde à travers le contrôle des médias et réseaux sociaux

Dans la continuité d’un contrôle accru des réseaux sociaux et médias et de la lutte contre la désinformation, le gouvernement indien, inquiet de la dégradation de son image à l'international, exige de Twitter, Facebook et Instagram la suppression du terme « variant indien ». Le gouvernement indien a réinvesti les réseaux sociaux afin de redonner une image positive aux actions de Modi, comme en témoignent la création de faux journaux en ligne tels « Australia Today » ou « the British Herald » et le lancement de la chaîne « Doodarshan International ». Ces médias destinés à une audience internationale servent à lutter contre les fausses informations prétendument véhiculées par la presse étrangère.

Preserving India's international image through the control of media and social networks

In continuity with the increased control of social networks and media and the fight against disinformation, the Indian government, worried about the deterioration of its image internationally, is demanding that Twitter, Facebook and Instagram remove the term "Indian variant",. The Indian government has reinvested in social networks in order to give a positive image to Modi's actions, as evidenced by the creation of fake online newspapers such as "Australia Today" or "the British Herald" or the launch of channel "Doodarshan International" aimed at an international audience to fight against false information conveyed by the foreign press.

 
 

Source religieuse

 
 

Les chrétiens de l'ethnie Mizo fuient le Myanmar vers l'État du Mizoram

Plus de 16 000 réfugiés birmans, principalement des chrétiens de l’ethnie Mizo, ont franchi la frontière indienne pour se réfugier dans l'État du Mizoram. Ce flux de réfugiés augmente quotidiennement compte tenu de la répression militaire du mouvement de désobéissance civile au Myanmar. 20 élus birmans se trouvent parmi les réfugiés. Les États du Mizoram, Nagaland, Manipur et Arunachal Pradesh sont frontaliers du Myanmar sur 1 643 km et jusqu’à présent, le gouvernement indien n’a pas reconnu ses migrants comme des réfugiés.

Ethnic Mizo Christians flee Myanmar to Mizoram State


More than 16,000 Burmese refugees, mainly Christians of the Mizo ethnic group, have crossed the Indian border to take refuge in the state of Mizoram. This flow of refugees is increasing daily due to the military crackdown on the civil disobedience movement in Myanmar. 20 Burmese elected officials are among the refugees. The states of Mizoram, Nagaland, Manipur and Arunachal Pradesh border Myanmar for 1,643 km and the Indian government has not recognized its migrants as refugees for the moment.

 
 

Sources Société civile

 
 

Plainte contre l’association Hindus for Human Rights aux États-Unis

L’association Hindus for Human Rights, de Sunita Vishwanath, fait face à une plainte pour diffamation déposée par l’Hindu American Foundation (HAF), organisation proche du gouvernement indien. Hindus for Human Rights, prônant une approche progressiste et inclusive de l’hindouisme, a déclaré que HAF a reçu des fonds de secours fédéraux contre la crise de la covid-19. Cette plainte confronte ainsi les deux visions de l’hindouisme présentes dans la diaspora indienne aux États-Unis.

Complaint against the association Hindus for Human Rights in the United States

Hindus for Human Rights, Sunita Vishwanath, is facing a defamation suit filed by the Hindu American Foundation (HAF), an organization close to the Indian government. Hindus for Human Rights, which advocates a progressive and inclusive approach to Hinduism, has claimed that HAF received federal relief funds for the Covid-19 crisis. This complaint thus confronts the two visions of Hinduism present in the Indian diaspora in the US.

 
 

Entretien avec le pasteur Sanjay Bandhari dans le Karnataka

Le pasteur Sanjay Bandhari a été attaqué en avril par des nationalistes hindous, et révèle dans un entretien pour l’ONG International Christian Concern que c’est une première depuis des décennies. Il s’inquiète de l’intolérance religieuse grandissante envers les minorités, et salue par ailleurs deux jugements de la Haute Cour de Madras et de la Cour Suprême réaffirmant la liberté de croyance et de religion. Il espère que ces déclarations juridiques seront rapidement appliquées sur le terrain.

Interview with Pastor Sanjay Bandhari in Karnataka


Pastor Sanjay Bandhari was attacked in April by Hindu nationalists, and reveals in an interview for the NGO International Christian Concern that this is the first time in decades. He is concerned about growing religious intolerance towards minorities and welcomes two rulings by the Madras High Court and the Supreme Court reaffirming freedom of belief and religion. He hopes that these legal declarations will be translated into action on the ground soon.


 
 

Sources académiques

 
 

La mauvaise gestion de la crise sanitaire fragilise la figure de Modi

Christophe Jaffrelot, directeur de recherche au CERI, analyse l’impact de l’absence de Modi pour gérer la crise sanitaire sans précédent provoquée par la seconde vague meurtrière de la covid-19. Cette mauvaise gestion fragilise la figure quasi intouchable de Modi, à l’instar d’autres hommes politiques populistes comme Trump ou Bolsonaro avant lui.

The mismanagement of the health crisis weakens Modi's figure

Christophe Jaffrelot, director of research at CERI, analyzes the impact of Modi's failure to manage the unprecedented health crisis caused by the second deadly wave of Covid-19. This mismanagement weakens the almost untouchable figure of Modi, like other populist politicians like Trump or Bolsonaro before him.

 
 

La pandémie du Covid-19 révèle les rouages du régime populiste de Modi

Le sociologue Jules Naudet analyse la seconde vague du covid-19 comme un révélateur des rouages du gouvernement populiste de Modi, qui tente à la fois de minimiser le nombre de décès liés au Covid-19, et de contrôler l’information concernant l’épidémie en ciblant les réseaux sociaux et médias pour dissimuler l’incapacité des pouvoirs publics et politiques à faire face à cette seconde vague. Jules Naudet affirme que le désastre sanitaire indien révèle l’« inanité de l’autoritarisme, de l’identitarisme et du capitalisme de connivence » du gouvernement indien.

The Covid-19 pandemic reveals the workings of Modi's populist regime

Sociologist Jules Naudet analyzes the second wave of Covid-19 as a revelation of the workings of Modi's populist government, which attempts to both minimize the number of deaths related to Covid-19 and to control information about the epidemic by targeting social networks and media to conceal the inability of public and political authorities to deal with this second wave. Jules Naudet states that the Indian health disaster reveals the "inanity of authoritarianism, identity politics and crony capitalism" of the Indian government.

 
 

Analyse de l’impact des élections régionales indiennes sur la politique nationale

Philippe Humbert revient sur les élections régionales dans les États du Bengale-Occidental, Assam, Tamil Nadu, Delhi, Kerala et Bihar, et analyse les répercussions des résultats sur la politique nationale du BJP qui s’est considérablement fragilisée à l’aune de la crise de la covid-19.

Analysis of the impact of Indian regional elections on national politics

Philippe Humbert reviews the regional elections in the states of West Bengal, Assam, Tamil Nadu, Delhi, Kerala and Bihar, and analyzes the repercussions of the results on the national politics of the BJP, which has been considerably weakened by the Covid-19 crisis.

 
 

En savoir plus

 
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Ce bulletin de veille est réalisé par l’Observatoire Pharos, observatoire du pluralisme des cultures et des religions, dans le cadre de sa mission d’étude de la situation du pluralisme en Inde. Il rassemble des informations, analyses et déclarations qui ne reflètent pas systématiquement la perception de la situation par l’Observatoire Pharos, mais qui constituent des documents à intégrer dans l’analyse. Les destinataires, partenaires de l’Observatoire Pharos, sont invités à contribuer à la qualité de cette veille par le partage de toutes informations utiles et diffusables.

This newsletter is written by Pharos Observatory, an observatory of cultural and religious pluralism, as part of its assessment study of religious pluralism in India. It gathers information, analyses and speeches which may not reflect Pharos Observatory's feeling about the situation, but which should be taken into account as part of the analysis. All recipients, who are Pharos Observatory partners, are encouraged to contribute to this Watch by sharing any information that is worthwhile and fit to print.