Les effets d’un rétablissement des relations irano-saoudiennes / L’histoire de la conversion tardive du Mont-Liban au christianisme / L’élection de Sleiman Frangié pourrait se faire sans l’appui des grands partis chrétiens
 
capture-decran-2020-04-09-a11-58-24

VEILLE PHAROS /
LIBAN – 15 mars 2023

 
capture-decran-2020-04-09-a11-58-11
 

L’Arabie saoudite et l’Iran annoncent le rétablissement de leurs relations diplomatiques après six années de rupture. Cette annonce laisse présager un potentiel déblocage de la situation libanaise et l’élection d’un nouveau président de la République.

Le camp du Hezbollah espère pouvoir obtenir l’élection de Sleiman Frangié par un soutien des députés sunnites proches de l’Arabie saoudite, après un feu vert de celle-ci. De son côté, le parti des Forces libanaises considère que le rapprochement entre les deux puissances régionales doit mener au retrait de la candidature de Sleiman Frangié permettant l’élection d’un président consensuel.

Dans le domaine historique, Ici Beyrouth aborde cette semaine l’histoire méconnue de la conversion tumultueuse du mont Liban au christianisme.


Saudi Arabia and Iran announce the restoration of diplomatic relations between the two countries after 6 years of rupture.

This announcement suggests a potential unblocking of the Lebanese situation and the election of a new president of the Republic.

If the Hezbollah camp hopes to obtain the election of Sleiman Frangié through the support of Sunni deputies close to Saudi Arabia, after a green light from the latter, the Lebanese Forces party considers that the rapprochement between the two regional powers should lead to the withdrawal of Frangié's candidacy allowing the election of a consensual president.

In the historical field, Ici Beyrouth deals this week with the little-known story of the tumultuous conversion of Mount Lebanon to Christianity.

 
 

Info phare - Source médiatique

 
 

Les effets d’un rétablissement des relations irano-saoudiennes

Après six années de rupture, l’Arabie saoudite et l’Iran ont annoncé le rétablissement des relations diplomatiques d’ici deux mois. 

Cette annonce a été largement commentée par les milieux politiques libanais où l’élection présidentielle est toujours à l'arrêt. La rupture des relations diplomatiques entre les deux puissances régionales a mené à une accentuation de la polarisation politique entre les alliés respectifs des deux pays.

Le secrétaire général du Hezbollah a affirmé que le retour des relations diplomatiques entre les deux pays jouera en faveur des peuples de la région et pourrait ouvrir des horizons dans toute la région ainsi qu’au Liban. Le Hezbollah mise sur une amélioration des relations irano-saoudiennes pour permettre l’élection de son candidat Sleiman Frangié. Le Parti de Dieu a cependant, par la voix de son secrétaire général, rappelé que l’accord entre les deux puissances ne suffirait pas et que le compromis interne restait un passage obligé.

De son côté, le Courant Patriotique Libre a salué le rétablissement des relations diplomatiques entre les deux puissances régionales. Il a affirmé que les solutions aux problèmes internes libanais ne viendront pas de l’étranger. Le parti de Gebran Bassil, allié du Hezbollah, reste sur une position opposée à celle de son allié chiite concernant la candidature de Sleiman Frangié et voit l’appui du Parti du Dieu à son candidat comme une tentative de passage en force au détriment des grands partis chrétiens du pays.

Même son de cloche du côté du parti des Forces libanaises, qui a affirmé que l’amélioration des relations irano-saoudiennes devait mener à un fléchissement de la position du Hezbollah sur la candidature de Sleiman Frangié.

Enfin, l’Arabie saoudite semble conditionner son retour sur la scène politique libanaise à des réformes de l’appareil d’État libanais,  mais surtout à un désengagement du Hezbollah de la scène yéménite, où le Hezbollah est accusé d’apporter une aide substantielle aux rebelles Houthis.

Restoration of Iranian-Saudi relations and Lebanese hopes

After 6 years of rupture, Saudi Arabia and Iran announced the restoration of diplomatic relations within two months. 

This announcement was widely commented in Lebanese political circles where the presidential election is still at a standstill and where the rupture of diplomatic relations between the two regional powers had led to an accentuation of the political polarization between the respective allies of the two countries.

The Secretary General of Hezbollah said that the return of diplomatic relations between the two countries will benefit the peoples of the region and could open up horizons in the whole region as well as in Lebanon. Hezbollah is counting on an improvement in Iranian-Saudi relations to allow the election of its candidate Sleiman Frangié. However, the Party of God, through its Secretary General, recalled that the agreement between the two powers would not be enough and that the internal compromise remains a necessary step.

For its part, the Free Patriotic Current, while welcoming the restoration of diplomatic relations between the two regional powers, said that the solutions to the internal Lebanese problems will not come from abroad. The Party of Gebran Bassil, allied with Hezbollah, remains on a position opposed to that of its Shiite ally regarding the candidacy of Sleiman Frangié and sees the support of the Party of God to its candidate as an attempt to force its way through to the detriment of the major Christian parties in the country.

The same is true for the Lebanese Forces party, which said that the improvement of Iranian-Saudi relations should lead to a softening of Hezbollah's position on the candidacy of Sleiman Frangié.

Finally, Saudi Arabia seems to condition its return to the Lebanese political scene to reforms of the Lebanese state apparatus but especially to a disengagement of Hezbollah from the Yemeni scene, where Hezbollah is accused of providing substantial assistance to Houthi rebels.

 
 

Sources médiatiques

 
 

L’histoire de la conversion tardive du Mont Liban au christianisme

Ici Beyrouth revient cette semaine sur la lente christianisation du mont Liban, une période occultée par les manuels scolaires libanais.

Les manuels scolaires libanais foisonnent de détails sur le peuple phénicien. Mais, la période transitoire qui voit le christianisme s’imposer, avant l’arrivée des troupes musulmanes, est rarement étudiée par les jeunes libanais.

Alors que la christianisation des Phéniciens hellénisés du littoral remonte aux premiers siècles de notre ère, les populations montagneuses resteront très longtemps imperméables aux tentatives d'évangélisation.

Des missionnaires chrétiens de Constantinople ont tenté de convertir ces territoires peu accessibles. Nombreux sont blessés et d’autres mis à mort. Il faudra attendre l’intervention de missionnaires locaux partageant avec ces populations montagnardes, une culture commune et parlant la langue syriaque pour que le christianisme se propage largement dans les vallées tortueuses du mont-Liban.

The story of the late conversion of Mount Lebanon to Christianity

This week, Ici Beirut takes a look at the slow Christianization of Mount Lebanon, a period deliberately ignored by Lebanese schoolbooks.

While Lebanese textbooks are full of details about the Phoenician people, the transitional period that saw Christianity impose itself before the arrival of Muslim troops is rarely studied by young Lebanese.

And for good reason, while the Christianization of the Hellenized Phoenicians of the coast goes back to the first centuries of our era, the mountainous populations remained for a long time impervious to the attempts of evangelization.

Although Christian missionaries from Constantinople did attempt to evangelise these inaccessible territories, many were injured and others put to death. It was not until the intervention of local missionaries who shared a common culture with these mountain populations and spoke the Syriac language that Christianity spread widely in the tortuous valleys of Mount Lebanon.

 
 

L’élection de Sleiman Frangié pourrait se faire sans l’appui des grands partis chrétiens

Alors que le rétablissement des relations diplomatiques entre l’Arabie saoudite et l’Iran laisse présager un déblocage de la situation libanaise, le Hezbollah et son allié Amal ont officialisé leur soutien à la candidature de Sleiman Frangié.

Ne pouvant obtenir le soutien de son principal allié chrétien - le Courant patriotique libre de Gebran Bassil refusant de soutenir la candidature de son rival - le Hezbollah pourrait tenter de trouver des voix manquantes à l’élection de son candidat en profitant de l’absence de leadership sunnite.

Sur les 27 sièges occupés par des parlementaires sunnites, 9 sont occupés par des indépendants alignés sur les forces du 8 mars (alliance pro-Hezbollah), 7 sont occupés par des personnalités affichant une opposition frontale au Hezbollah et 11 sont d’anciens haririens ou des indépendants.

La stratégie du Hezbollah s’appuierait sur le soutien de ces 11 députés à la candidature de Sleiman Frangié. Soutien qui reste largement tributaire du feu vert de l’Arabie saoudite, gardien historique de la communauté sunnite, qui pourrait advenir en cas d’entente régionale entre l’Iran et l’Arabie saoudite. 

Frangie's election could take place without the support of the major Christian parties

While the restoration of diplomatic relations between Saudi Arabia and Iran suggests a breakthrough in the Lebanese situation, Hezbollah and its ally Amal have formalized their support to the candidacy of Sleiman Frangié.

Unable to obtain the support of its main Christian ally, the Free Patriotic Movement of Gebran Bassil, which refuses to support the candidacy of its rival, Hezbollah could try to find some of the missing votes for the election of its champion by taking advantage of the absence of Sunni leadership.

Of the 27 seats held by Sunni parliamentarians, 9 are held by independents aligned with the March 8 forces (pro-Hezbollah alliance), 7 are held by personalities displaying frontal opposition to Hezbollah and 11 are former Haririans or independents.

Hezbollah's strategy is based on the support of these 11 deputies to the candidacy of Sleiman Frangié. This support remains largely dependent on the green light from Saudi Arabia, the historical guardian of the Sunni community, which could happen in case of a regional agreement between Iran and Saudi Arabia. 

 
 

Source confessionnelle

 
 

Le patriarche Raï salue la réconciliation irano-saoudienne

Dans le cadre de son homélie dominicale, le patriarche maronite Raï a salué le rétablissement des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Arabie saoudite considérant que cette étape s’inscrivait dans un cadre de réconciliation politique de plus grande envergure qui pourrait inclure le Liban.

Affirmant que le Liban est le lieu de rencontre et de dialogue des religions et des civilisations, le patriarche maronite a exprimé son souhait pour une réconciliation inter libanaise permettant au pays de retrouver un rôle neutre par rapport aux conflits et guerres extérieures. 

Concernant l’élection présidentielle, Mgr Raï a estimé que le crime commis par les députés de la nation était la non-élection d’un président en raison des divisions internes, considérant qu’aucun parti n’avait un droit de véto sur ce sujet. 

Patriarch Rai calls for inter-Lebanese reconciliation after Iranian-Saudi reconciliation

In his Sunday homily, Maronite Patriarch Rai welcomed the restoration of diplomatic relations between Iran and Saudi Arabia considering that this step was part of a larger political reconciliation framework that could include Lebanon.

Affirming that Lebanon is the place where religions and civilisations meet and dialogue, the Maronite Patriarch expressed his wish for an inter-Lebanese reconciliation allowing the country to regain a neutral role with regard to external conflicts and wars. 

Speaking about the presidential election, Archbishop Raï considered that the crime committed by the nation's deputies was the non-election of a president due to internal divisions, considering that no party had a veto right on this issue. 

 
 

Sayyed Ali Fadlallah appelle à un changement des mentalités

Dans un discours prononcé dans la commune de Jalala, Sayyed Ali Fadlallah a affirmé qu’il était erroné de penser que la situation actuelle du Liban pouvait être modifiée par l’élection d’un nouveau président de la République, la nomination d’un nouveau Premier ministre, l’élection d’un nouveau Parlement ou par la promulgation de nouvelles lois.

Selon le dignitaire chiite, toutes ces modifications devront être précédées par un changement radical des mentalités. Sayyed Ali Fadlallah a appelé les responsables politiques à se comporter en véritables hommes d’État, plaçant l'intérêt public au-dessus des intérêts partisans et confessionnels et gouvernant le pays selon des principes rationnels.

Sayyed Ali Fadlallah calls for a change in mentality

In a speech in the municipality of Jalala, Sayyed Ali Fadlallah said that it was wrong to think that the current situation in Lebanon could be changed by the election of a new President of the Republic, the appointment of a new Prime Minister, the election of a new Parliament or the promulgation of new laws.

According to the Shiite dignitary, all these changes will have to be preceded by a radical change of mentality. Sayyed Ali Fadlallah therefore called on politicians to behave as true statesmen, placing the public interest above partisan and confessional interests and governing the country according to rational principles.


قال السيد علي فضل الله ، في كلمة ألقاها في  بلدة جلالا: «ليس من الدقة التفكير بأن الواقع الذي نعيشه يمكن لنا أن نغيره بانتخاب رئيس جمهورية جديد أو بتعيين رئيس حكومة جديد او بانتخاب مجلس نيابي جديد وحتى بتغيير للقوانين أو ابتداع صيغة جديدة  فلا تغيير حقيقيا إلا بتغيير العقلية التي تحكم واقعنا، وإلا سوف نلتف على كل الصيغ والقوانين لتعطيلها ، لا تغيير إلا عندما نعيد الاعتبار لمفهوم المسؤولية ونتصرف كرجال دولة يعملون لتدبير شؤونها وفق القواعد الإدارية العقلانية ومعايير المصالح العامة، لا كما يحدث ويتم التعامل مع الدولة كمواقع سلطة ونفوذ وغنائم ،كما أن لا تغيير إلا عندما نفكر بحجم هذا الوطن لا بحجم طائفة أو مذهب  أو جماعة  أو أي إطار ضيق».



 
banderole-veille
soutien-veilles-observatoire-pharos-banniere
 

This newsletter is written by Pharos Observatory, an observatory of cultural and religious pluralism, as part of its assessment study of religious pluralism in the Near and Middle East. It gathers information, analyses and speeches which may not reflect Pharos Observatory's feeling about the situation, but which should be taken into account as part of the analysis. All recipients, who are Pharos Observatory partners, are encouraged to contribute to this Watch by sharing any information that is worthwhile and fit to print.

Ce bulletin de veille est réalisé par l’Observatoire Pharos, observatoire du pluralisme des cultures et des religions, dans le cadre de sa mission d’étude de la situation du pluralisme au Proche et au Moyen-Orient. Il rassemble des informations, analyses et déclarations qui ne reflètent pas systématiquement la perception de la situation par l’Observatoire Pharos, mais qui constituent des documents à intégrer dans l’analyse. Les destinataires, partenaires de l’Observatoire Pharos, sont invités à contribuer à la qualité de cette veille par le partage de toutes informations utiles et diffusables.