La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales de 1950[1] aux termes de son article 9 affirme « Toute personne a droit à […] la liberté de changer de religion ou de conviction ». Le droit de changer de religion est une réponse à la prédétermination de la religion de l’individu décidée par ses aînés. L’individu, en quête de nouvelles vérités, pourra ainsi mener individuellement un chemin de recherche spirituelle. Il pourra également être influencé par l’enseignement d’autres croyants souhaitant faire de ce dernier un nouveau prosélyte de leur foi.
Changer de religion, un chemin individuel
L’homme est rarement en mesure de choisir en toute liberté sa religion originaire [2].En effet, cela relève bien souvent de la filiation ou d’un baptême de la responsabilité des parents ou du responsable légal. Cette religion, enseignée à l’individu avant qu’il ne puisse faire son propre choix est d’ailleurs garantie par la Convention européenne elle-même [3].
Ainsi, en grandissant et en devenant indépendant, une personne, en Europe, se voit garantir la possibilité de changer de religion. Ce chemin spirituel, nouvellement entrepris par l’individu, est protégé par la Cour européenne au nom de la liberté de religion. Cela lui permet d’interroger et de rechercher paisiblement sa foi.
La protection du prosélytisme, une nécessité pour la lettre de la Convention
D’un côté, la Convention européenne, notamment sa jurisprudence [4], affirme que la liberté religieuse des individus inclue pour les croyants « le droit d’essayer de convaincre son prochain » [5], c’est à dire la liberté de prosélytisme.
D’un autre côté, la Convention européenne (notamment son article 9) et la Cour de Strasbourg garantissent à chaque individu le droit de changer de religion et de se convertir.
Ces deux libertés distinctes sont néanmoins liées. C’est ainsi que l’action pour un individu de tenter de rallier à sa foi un autre individu [6] permet indéniablement une ouverture spirituelle pour la personne en quête d’une nouvelle conviction. Le prosélytisme permet aux individus de découvrir d’autres chemins spirituels et de décider par eux-mêmes lequel prendre. Cette action de prosélytisme est primordiale selon la Cour, « sans quoi du reste ‘la liberté de changer de religion ou de conviction’ risquerait de demeurer lettre morte » [7].
Le prosélytisme relève alors de la liberté conventionnelle des individus de partager leur foi et permet à autrui d’appréhender d’autres croyances ; appréhension -et conversion- également permise par la lettre de la Convention.
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[1] E. PICHON LENG, « La liberté religieuse, une notion encadrée en Europe par la CEDH », Observatoire Pharos, Mai 2019.
[2] H. HSAINI, « le prosélytisme et la liberté religieuse à travers le droit franco grec et la CEDH », Université Panthéon Sorbonne, 2002.
[3] Voir en ce sens l’article 2 du Protocole additionnel n°1 de la Convention européenne des droits de l’homme « droit à l’instruction ».
[4] E. PICHON LENG, « Le prosélytisme religieux en Europe », Observatoire Pharos, Mai 2019.
[5] CEDH, Kokkinakis c. Grèce, 25 mai 1993, requête n° 14307/88., §31.
[6] Toutes les formes de prosélytisme ne sont pas permises, en ce sens voir : E. PICHON LENG « Quelles sont les formes de prosélytisme interdites en Europe ? », Observatoire Pharos, Juin 2019.
[7] Affaire Kokkinakis précitée, §31
Image : Religion stencil (edited) by Matthew Fearnley. Flickr CC BY 2.0.