En pleine bataille pour la libération de Mossoul, le commandement régional de la police de Nineveh a décidé, le 1er juin dernier, que le niqab était dorénavant interdit. Dans une ville connue pour son conservatisme et sa société patriarcale depuis l’arrivée de groupes islamistes en 2006, cette décision a été accueillie de façon assez mitigée.
Le niqab est un voile intégral couvrant l’ensemble du corps, à l’exception des yeux ; il peut être parfois accompagné de gants destinés à cacher les mains. Or, les partisans de son interdiction font valoir la nécessité, pour les forces de sécurité irakiennes, de pouvoir estimer, de loin, si les civils ne portent pas sur eux de ceintures d’explosifs ou d’autres armements. En effet, un nombre croissant de kamikazes habillés en civil, dissimulés parmi les flots de réfugiés, seraient envoyés par l’Etat islamique afin de faire détonner leurs explosifs au niveau des barrages filtrants établis par les soldats irakiens. Ces attaques suicides sont de plus en plus effectués par des femmes, essentiellement des épouses de djihadistes tués au cours des combats.
Le niqab peut ainsi permettre à une femme, mais aussi à un homme, de dissimuler des explosifs : le 3 juillet par exemple, un djihadiste déguisé en femme s’est fait exploser dans un camp de réfugiés dans le sud de la Syrie, en faisant détonner les explosifs qu’il avait cachés sous son niqab. Le même jour, à Mossoul, deux femmes kamikazes sont parvenues à tuer un soldat irakien et à en blesser plusieurs dizaines d’autres de la même manière.
Le général de brigade Wathiq al-Himdani, chef de la police de la province de Nineveh, a exprimé son embarras quant à la question de la fouille des femmes portant le niqab : pour lui, des hommes ne peuvent pas fouiller une femme, pour des raisons de dignité et de morale. Or, l’armée irakienne ne compte aucune femme dans ses rangs. Interdire le niqab est, dès lors, apparu comme la solution la plus simple et efficace à mettre en place.
Certaines habitantes de Mossoul portant le niqab font valoir quant à elle une atteinte à leurs libertés individuelles, affirmant qu’elles le portaient bien avant l’arrivée des djihadistes, qui l’ont imposé lors de la capture de la ville ; de fait, au-delà de l’aspect purement sécuritaire, le niqab représente également l’occupation de Daech pour beaucoup de Mossouliotes. Certaines femmes ont ainsi accueilli avec enthousiasme cette interdiction, affirmant qu’elles « suffoquaient quand [elles] le mettaient ».
Image : des réfugiés quittent Mossoul, alors que les combats font rage. By Mstyslav Chernov