En septembre 2017, le Taoiseach (Premier ministre irlandais) Leo Varadkar avait annoncé l’organisation d’un référendum sur le droit à l’avortement pour mai-juin 2018. A l’heure actuelle, les femmes ne peuvent se faire avorter que dans le cas où la grossesse pourrait mettre leur vie en danger. Le huitième amendement de la constitution donne au fœtus le statut de citoyen, faisant de l’avortement un meurtre. La femme comme le médecin sont passibles d’une peine de 14 ans de prison, ce qui amène souvent les professionnels de santé à refuser d’effectuer un avortement même dans le cas où il est médicalement nécessaire et donc légal. Cet amendement avait été introduit en 1983 par référendum, avec l’appui de 67 % des votants.
L’Eglise catholique oppose au droit à l’avortement la défense de la vie
Suite à l’annonce du Taoiseach, l’Église catholique s’était montrée plutôt discrète et avait peu commenté la question, jusqu’à hier (6 janvier 2018) : alors qu’en décembre 2017, un comité spécial a rendu à l’Oicheatas (parlement irlandais à deux chambres) un rapport préconisant la levée du huitième amendement et l’autorisation d’avorter jusqu’à 12 semaines de grossesse, l’archevêque Eamon Martin a appelé la communauté catholique à se faire « missionnaire pour la cause de la vie » en votant contre la fin de l’interdiction de l’avortement. Il souhaite que les catholiques « ignorent la forte pression à rester silencieux » et « chérissent le cadeau de la vie à tout moment, de la conception à la mort naturelle ». Pour l’archevêque, le huitième amendement sacralise les notions d’égalité et de respect de la vie humaine. L’abolir reviendrait à donner à des individus lambda un droit de vie ou de mort, un droit qui est supposé être divin uniquement. A ses yeux, l’Irlande a aujourd’hui l’opportunité de témoigner de la valeur égale qu’elle accorde à toute forme de vie : « Nous prenons soin du plus faible et plus petit, du plus fort et en meilleure santé, du plus jeune, du plus vieux, et de tout le merveilleux spectre de vie entre ceux-ci ».
Un poids toujours important sur les questions sociétales
Il est à noter que l’Irlande est un pays majoritairement catholique qui a tendance à écouter ses leaders religieux. Ceux-ci ont historiquement une forte influence sur la politique du pays. Cependant, rappelons que l’Église catholique avait été prise de court en mai 2015 lors d’un référendum sur le mariage pour tous qui avait vu 62 % des électeurs voter en faveur de cette réforme. Ceci avait alors été interprété comme le témoignage d’une évolution libérale des mœurs et de la société irlandaise. D’ailleurs, nous remarquons que les leaders des différentes Eglises irlandaises ont choisi de ne pas mentionner le référendum sur le huitième amendement dans leurs vœux communs pour 2018, laissant entendre une désaccord majeur sur la question.
Image : WomensMarch, By Mobilus In Mobili – Own work, CC BY-SA 4.0,