Dimanche dernier, les autorités israéliennes ont démoli deux salles de classe d’une école en Cisjordanie. Selon l’information de Reuters relayée, entre autres, par le journal libanais L’Orient le Jour, les pouvoirs publics israéliens affirment que cette partie de l’établissement, située dans un bâtiment indépendant, aurait été construite de façon illégale. Pourtant, cette école est financée en partie par l’Union Européenne au profit des communautés bédouines installées dans le village d’Abou Nouwar, dans le sud du pays.
Le COGAT face à l’Union Européenne
Ce conflit oppose notamment le COGAT (Coordination of Government Activities in the Territories) et l’Union Européenne. Le COGAT est l’organe du ministère de la Défense en charge des affaires civiles dans les « zones C » issues du partage de la Cisjordanie en trois zones suite à l’accord intérimaire sur la Cisjordanie et la Bande de Gaza (ou Oslo II), signé en 1995. Selon cet accord – conçu à l’origine pour une période de cinq ans au terme de laquelle devait naître un État palestinien indépendant -, la zone C est placée sous contrôle civil et militaire d’Israël. Cette zone, qui représente 60 % de la Cisjordanie, comprend des villages palestiniens ainsi que des colonies israéliennes. Selon le COGAT, la destruction de l’école est tout à fait légale puisque le bâtiment avait été construit « sans les autorisations nécessaires » et que la démolition avait été « approuvée par la Cours Suprême ». Au contraire, le responsable des relations médias du bureau de l’UE à Jérusalem a demandé « une fois de plus à Israël de ne pas démolir des projets financés par l’Union Européenne ». Quand à Saëb Erekat, secrétaire général de l’Organisation pour la Libération de la Palestine (OLP), il estime que cette politique ne vise « qu’à briser la volonté de liberté et de vie des Palestiniens ». En effet, selon les responsables palestiniens, c’est la cinquième fois depuis 2016 que cette école fait l’objet des mesures du COGAT.
Permis de construire et droit à l’éducation
Ce n’est donc pas le premier conflit qui éclate entre l’Union Européenne et le COGAT à propos de projets financés dans la Zone C de la Cisjordanie. En août 2017, quelques jours avant la rentrée des classes, le COGAT avait saisi un jardin d’enfants, détruit l’école primaire de Joub El-Thib et confisqué les panneaux solaires de l’école d’Abou Nouwar, seule source d’électricité de l’établissement. L’Union Européenne estimait alors qu’une centaine de structures – écoles, maisons, points d’eau… – financées par l’UE ou par des États membres en Cisjordanie avaient été démolies ou saisies en 2017 et réaffirmait le droit pour chaque enfant « à un libre accès à l’éducation » ainsi que l’obligation pour les États « de protéger, de respecter et d’appliquer ce droit ». A chaque fois, le COGAT affirme au contraire que ses actions sont parfaitement légales, étant donné qu’aucun permis de conduire n’a été délivré pour les structures en question. En effet, selon l’ONG Norwegian Refugee Council (NRC), la majorité des demandes de permis de construire en zone C auprès des pouvoirs publics israéliens aboutissent à un refus, ce qui pousse les Palestiniens et leurs pourvoyeurs étrangers à construire sans autorisation. En août dernier, Rami Hamdallah, Premier ministre palestinien, estimait que cette politique visait avant tout à « exercer des pressions afin que les communautés palestiniennes quittent leurs terres ».
Image : Girls at School, US Consulate General in Jerusalem, Réutilisation autorisée