Mgr Giacinto-Boulos Morcuzzo – vicaire patriarcal de Jérusalem et de Palestine – revient sur la profanation, le 20 septembre dernier, de l’Eglise Saint-Etienne à Bet Gemal. Il exprime ses inquiétudes dans une interview donnée à Aleteia, site chrétien d’information financé par la Fondation pour l’évangélisation par les médias. Selon lui, cet événement, qui s’est déroulé le jour du nouvel an juif (Roch Hachana), n’est qu’un symptôme de la montée de l’anti-christianisme en Israël.
Si l’identité des auteurs de cette attaque n’est pas connue, il est clair que cette dernière avait été planifiée. Pour Mgr Giacinto-Boulos Morcuzzo, elle était inspirée d’une lecture erronée de l’Ancien Testament, condamnant le fanatisme et l’adoration des idoles. En effet, l’évêque souligne le poids croissant de certains juifs ultraorthodoxes « fanatiques » qui luttent de façon plus ou moins violente contre la présence chrétienne en Terre Sainte. Si ces groupes ne refusent pas l’accès à la ville sainte aux pèlerins chrétiens, ils s’opposent en revanche à la présence permanente de leurs patriarcats et ont lancé une véritable guerre de l’immobilier afin de racheter les terrains appartenant aux congrégations chrétiennes.
L’immobilier, nœud des conflictualités à Jérusalem
L’immobilier est en effet un enjeux majeur à Jérusalem et dans ses alentours. Dans la vieille ville, Israéliens et Palestiniens luttent à coup d’acquisitions de biens pour occuper l’espace. A Jérusalem-Est, les Israéliens achètent les maisons des Palestiniens à prix d’or afin d’y implanter des colonies (« settlements« ) juives. Mais comme le rappelle Mgr Giacinto-Boulos Morcuzzo, l’immobilier est aussi un enjeu pour les congrégations chrétiennes. A titre d’exemple, en août dernier, une court militaire israélienne s’est prononcée en faveur de la location pour 99 ans par un groupe de colons (« settlers ») israéliens de deux hôtels et d’un vaste bâtiment appartenant au Patriarcat grec orthodoxe. Cette transaction avait été autorisée par l’ancien Patriarche Irénée, ce qui avait provoqué la colère des fidèles palestiniens et l’hostilité du Saint-Synode, qui avait décidé de déposer le Patriarche en 2005.
Pour les chrétiens, le statu quo est garant du pluralisme
Le jugement de la cour, allant donc à l’encontre des souhaits du Saint-Synode et du nouveau patriarche, a été dénoncé il y a quelques jours dans une Déclaration conjointe des Patriarches et des Chefs des Eglises de Jérusalem. Ces derniers mettent en garde contre la mise en péril du statu quo, rendu inviolable par le Traité de Berlin de 1878, qui régit le partage et la gestion des Lieux Saints à Jérusalem . Pour les différentes communautés chrétiennes, le respect de ce statu quo est vital puisqu’il garantit leur présence en Terre Sainte. Dans cette même déclaration, un projet de loi présenté à la Knesset (l’Assemblée monocamérale israélienne) est pointé du doigt car il mettrait en danger les droits des congrégations chrétiennes sur certaines de leurs propriétés dans la vieille ville. Pour ces Chefs d’Eglises, ce projet de loi est « politiquement motivé » et pourrait mettre en péril « la physionomie de notre société plurielle et […] faire croître ultérieurement les tensions qui ressortent en ces temps troublés ».
Notons que la question du statu quo avait également été soulevée en juillet dernier lors des heurts entre Palestiniens et Israéliens à propos de la mise en place de portiques de sécurité à l’entrée de l’esplanade des Mosquées.
Image : Church of the Holy Sepulchre, By Seetheholyland.net, Flickr, CC BY-SA 2.0