Le 21 septembre dernier avait lieu le traditionnel rapport de l’Examen Périodique Universel du Conseil des Droits de l’Homme, pour l’Indonésie, la Finlande et le Maroc. Cet exercice propre à l’organe genevois de l’ONU permet la défense d’un bilan par les Etats membres eux-mêmes dans le domaine des droits de l’Homme, qu’il s’agisse de recommandations précédentes du Conseil, d’engagements volontaires ou de réformes difficiles, pouvant requérir le soutien de la communauté internationale. Différent des classiques rapports unilatéraux, du département d’Etat américain ou de différents organes de l’ONU par exemple, cet examen s’appuie aussi sur un dialogue entre l’Etat concerné, plusieurs délégations d’autres pays et certaines ONG. Il souligne les points sur lesquels un Etat refuse de s’engager, évalue ainsi sa santé démocratique et son degré d’engagement pour des valeurs universelles, parfois niées ou non appliquées dans les faits par certains gouvernements.
Des avancées démocratiques encore difficiles
En effet, malgré les efforts menés ces dernières années en vue de la promotion des droits de l’Homme dans le paus, notamment grâce à certaines révisions de la Constitution de 2011, seulement 199 recommandations sur 244 ont été acceptées par le Maroc. Et pour justifier ces points noirs, un argumentaire récurrent : la prééminence constitutionnelle, juridique et sociale de l’islam en tant que religion d’Etat et pilier de la nation marocaine. Ainsi, les recommandations ayant trait à la décriminalisation de l’homosexualité, l’égalité dans l’héritage, la liberté de religion, et, plus largement, l’égalité stricte des sexes au sein de la société civile et politique marocaine ont été refusées. En effet, pour le département marocain des droits de l’Homme, ces recommandations sont en contradiction avec l’article premier de la Constitution qui fait de « la religion musulmane modérée », une « constante fédératrice » du royaume. Nombreux seront ceux qui y verront une opposition délibérée de l’islam marocain, quoique modéré, avec les valeurs défendues par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Le nouvellement créé Conseil national des droits de l’Homme (né en mai 2017), institution nationale marocaine indépendante, déplore lui-même ces prises de positions confortant la discrimination des groupes vulnérables, femmes et personnes LGBTI.
Le problème de la présence au Sahara Occidental
Un autre sujet crucial a été soulevé par plusieurs ONG, telles que la World Barca Organization, Amnesty International, le Mouvement international de la réconciliation et Libération : la présence du Maroc au Sahara occidental et son refus d’accorder le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui. Un contentieux permanent depuis 1975 et la Marche Verte, après des années de guerre, aujourd’hui révolues. Le Maroc a jusqu’à maintenant réussi à imposer par les armes et par sa diplomatie un statu quo : la marocanité du Sahara Occidental, ainsi que la négation juridique et politique de l’identité sahraouie. Et ce, même si la dénonciation du traitement des militants sahraouis et des violations des droits de l’Homme au Sahara dans la presse s’intensifie. Une nouvelle fois, on constate la relative impuissance des instances de l’ONU à faire accepter leurs recommandations, ici par le Maroc, et ailleurs dans des conflits armés.
Le long chemin des droits de l’Homme au Maroc
Néanmoins, il demeure que, dans ces domaines sociétaux et juridiques, le Maroc fait mieux que ses voisins, et que bien des pays musulmans. D’après le département interministériel aux droits de l’Homme, 168 recommandations seraient actuellement en cours d’application, particulièrement sur les sujets de la torture, des violences faites aux femmes, de l’asile politique et de l’accueil des migrants économiques. Le ministre marocain des droits de l’Homme, Mustapha Ramid, a quant à lui souligné que les recommandations approuvées seront intégrées dans une loi sur les droits de l’Homme qui entrera en vigueur en 2018. De plus, bien que la position marocaine semble ferme de jure, la peine de mort n’est plus appliquée de facto, et des femmes peuvent hériter dans l’égalité grâce à certains compromis familiaux, au sein d’une société marocaine qui demeure malgré tout très conservatrice et traditionaliste. On peut espérer que, sous la pression de la communauté internationale et des ONG marocaines très actives, les mentalités évolueront, et avec elles, les lois.
Image : UN Human Rights Council, Geneva – By United Nations Photo – Own Work, CC BY-NC-ND 2.0