En pleine urgence sanitaire, la société portugaise fait encore une fois preuve de solidité. Les débats ne manquent pas sur les raisons de la crise que provoque le SAR-CoV2. Néanmoins, la population semble globalement unie et solidaire. Deux décisions, indépendantes l’une de l’autre, ont mis en lumière le choix fait par le pays de l’humanité face à la crise.
En date du 31 mars, le pays (environ dix millions d’habitants) dénombrait 7443 personnes testées positives et 160 décès imputables au Covid-19.
Travailleurs agricoles touchés : un détail qui compte
Dans le district de Faro (sud du Portugal), un premier patient infecté par le SAR-CoV2 a été détecté au sein d’un groupe de travailleurs agricoles et transféré en soins intensifs (le 20 mars, ses jours n’étaient pas en danger). Comme dans la plupart des pays européens, les travailleurs de ce secteur sont souvent des immigrés. En l’occurrence, il s’agit d’un groupe d’environ 70 travailleurs indiens et népalais, hommes et femmes. Ils travaillent ensemble, habitent dans trois logements voisins et mangent ensemble. Les autorités sanitaires ont donc immédiatement décidé d’isoler tout le groupe.
La municipalité a mis à disposition une école élémentaire (comme en France, les écoles sont fermées et la population est confinée). Associations locales et autorités se sont mobilisées pour apporter d’abord des lits de camp, puis de véritables lits et des meubles, ainsi que des vêtements de rechange pour la durée du confinement. Les travailleurs symptomatiques ont été placés en quarantaine. Pour les autres, de petits groupes se sont répartis dans différentes salles de classe. Ils ont accès à l’eau et aux sanitaires dans l’établissement scolaire. Une infirmière est également présente.
Le détail qui compte, et qui montre que l’humanité face à la crise reste de mise, concerne l’alimentation. La Croix-Rouge locale a servi aux travailleurs les premiers repas…portugais. Le menu n’étant visiblement pas très apprécié, la mairie fait à présent appel à un cuisinier asiatique pour préparer quatre repas végétariens quotidiens. Une association népalaise locale fournit riz, lentilles et épices. La Croix-Rouge assure la distribution.
Parmi les lecteurs, certains en ont profité pour demander dans quelles conditions ces travailleurs vivent et travaillent habituellement au Portugal. Question pour le moment sans réponse dans le journal local qui a relayé l’information.
Régularisation provisoire des sans-papiers et demandeurs l’asile
L’accès au service national de santé portugais, mais aussi à l’emploi ou au logement, étant très compliqué sans statut officiel, le gouvernement a adopté une mesure d’urgence. Jusqu’au 30 juin, les sans-papiers et demandeurs d’asile dont la demande était en cours conserveront leurs droits. La mesure a été unanimement approuvée*.
Le Portugal a massivement accueilli des demandeurs d’asile depuis le début de la « crise migratoire » en Europe. Le pays reçoit également des demandes directement sur son territoire et la procédure peut être longue. De nombreux Brésiliens arrivent sur le territoire avant de déposer une demande d’immigration, notamment depuis 2019. De façon générale, les services de l’immigration sont à la peine pour suivre le nombre de demandes de titres de séjours, en hausse depuis plusieurs années (toutes catégories confondues).
Cette décision ne présume pas de l’issue des demandes à long terme, mais elle vient rappeler un fait simple : le virus ne vérifie pas le passeport avant de frapper.
*Note de l’O.J. : cette décision intervient alors que le pays commence tout juste à se relever de la crise provoquée par la panique financière de 2008. Le pays, en grave difficulté, s’était alors soumis à une cure très rude, qui a entre autres affaibli son service de santé, appauvri la population et généré une émigration massive (notamment d’infirmières).
Image : virus SAR-CoV2, Mattthewafflecat, licence libre sans attribution requise.