Les résultats d’une enquête menée en 2018 montrent que la région de Lisbonne présente la plus grande variété religieuse dans le pays. Pour la première fois, la minorité bouddhiste devient statistiquement visible. Lisbonne peut être considérée comme le laboratoire du pluralisme religieux du pays.
Un pays en grande majorité catholique
Au Portugal, une très grande majorité de la population se dit catholique. En 1999, le chiffre s’élevait à près de 87 %. En 2011, il avait reculé mais atteignait encore presque 80 %. Une étude récente du Pew Research Center trouvait un ordre de grandeur de 90 %.
Deux enquêtes qui révèlent une même tendance de fond
L’enquête, publiée en décembre 2018, a été réalisée conjointement par la Fondation Francisco Manuel dos Santos [1] et par le Centre de recherche en théologie et en études religieuses de l’Université catholique du Portugal. L’étude portait exclusivement sur la région métropolitaine de Lisbonne. Elle montre une diversité de croyances croissante dans la région.
Une étude précédente avait été réalisée en 2011 par la Conférence des évêques du Portugal. On y notait déjà une augmentation de la diversité religieuse au Portugal. Le pourcentage de catholiques diminuait et celui des autres confessions chrétiennes (protestantes, évangéliques) et des témoins de Jéhovah augmentait.
Si les échantillons (et donc les études) ne sont pas comparables en tant que tel, la même tendance est cependant observée.
Un laboratoire du pluralisme religieux
La région métropolitaine de Lisbonne concentre une grande partie de la population du Portugal. On y retrouve aussi la plus grande diversité d’origines, de nationalités et de croyances.
L’étude de 2018 révèle ainsi que, dans cette région, les « croyants sans religion » représentent aujourd’hui 13,1 % de la population. Les athées et les agnostiques représentent respectivement 10 % et 6,9 % de la population. Près de 5 % de la population se dit quant à elle indifférente à la question religieuse. Concernant les religions chrétiennes, on constate que le pourcentage de catholiques (54,9 %) est bien moindre que dans le reste du pays. Cette baisse en pourcentage dans la région (ainsi que dans l’Algarve, au sud du pays) était déjà amorcée en 2011, mais ne peut pas être extrapolée au reste du pays. Les protestants et évangéliques atteignent le chiffre de 5 %. Pour la première fois, les bouddhistes sont assez nombreux pour apparaître dans les statistiques, à hauteur de 0,7 %. On trouve aussi 0,8 % de musulmans.
Une population à la recherche de repères spirituels
La population ayant connu la plus forte croissance est celle des « croyants sans religion » (leur pourcentage aurait doublé depuis 2011, même si les chiffres ne sont que partiellement comparables). On retrouve ces croyants sans religion dans toutes les tranches d’âge et toutes les catégories sociales. De manière similaire, les personnes se déclarant bouddhistes seraient pour partie des personnes en recherche spirituelle. L’étude les appelle « serial seekers« . Dans les deux cas, il s’agit de personnes ayant été élevées dans une foi, ne se reconnaissant plus dans leur religion organisée, mais toujours à la recherche d’une voie spirituelle.
Les chercheurs ont donc identifié deux tendances possibles. Soit une tension vers l’athéisme ou l’agnosticisme, soit un passage au fil des années d’une religion à une autre. Les auteurs avancent une hypothèse pour analyser cet état de fait. D’un côté, une éducation religieuse pour la majorité de la population. De l’autre, l’idéal d’exploration d’une identité personnelle. La fusion des deux pourrait en partie expliquer ce phénomène.
Une pratique cultuelle sans conflit
L’étude indique que la répartition géographique des populations pratiquant chacun des cultes est inégale. Les croyances « minoritaires » correspondent en partie aux zones où la population est originaire d’une autre région ou d’un autre pays. Cependant, la majorité des lisboètes est installée depuis au moins 10 ans dans cette région. Interrogées sur leur pratique cultuelle, l’écrasante majorité des personnes croyantes indique avoir accès à un lieu de culte à proximité de chez elle. De même, 90 % des interrogés indiquent n’avoir jamais fait l’objet d’exclusion ou de discrimination du fait de leur appartenance religieuse (ou absence de croyance).
La région de Lisbonne est donc un lieu d’échange et de croisement, à l’échelle du Portugal, entre des personnes d’origines et de croyances variées, en mutation rapide. Il est intéressant de remarquer que ces changements, malgré leur soudaineté, semblent se faire sans conflit, dans le respect de chacun et avec une réelle possibilité de pratiquer sa religion dans son quartier.
[1] Fondée en 2009, cette fondation est apolitique et non confessionnelle. Elle a pour mission de réaliser des études, des rapports et des conférences sur la réalité portugaise dans de nombreux domaines (santé, territoire, justice, UE…). Ainsi, la Fondation entend donner un accès public au savoir spécialisé et contribuer au débat public.
Image : Mosteiro dos Jerónimos Lisonne Portugal by Gilles Messian , Wikicommons CC BY 2.0