Le weekend du 15 juillet se déroulait à Séoul l’annuel Korea Queer Culture Fetival, équivalent coréen de la Gay Pride. Autorisé depuis l’année 2000, le festival est passé d’environ 50 personnes en 2000 à quelque 50 000 en 2015, selon ses organisateurs. Cette année, plus de 100 kiosques ont été installés sur le Seoul Plaza au cours du week-end, dirigés par des organisations dont au moins 10 ambassades et la Commission nationale des droits de l’Homme de Corée, qui ont participé au festival pour la première fois. Alors que l’homosexualité n’est pas un crime en Corée du Sud, les personnes LGBT vivent largement en marge de la société car la majorité des Coréens restent intolérants à l’homosexualité. Depuis des années, les défenseurs des droits de l’Homme ont fait campagne pour une nouvelle loi interdisant la discrimination fondée sur le genre, l’orientation sexuelle, le handicap, l’âge, la race, l’état matrimonial ou la religion. Mais les efforts visant à promulguer la loi sont en contradiction avec une forte opposition des groupes protestants, qui font valoir que le mouvement encouragerait l’homosexualité et conduirait au chaos social.
Un festival à dimension internationale
Les ambassadeurs et diplomates de plusieurs ambassades, y compris les ambassades des États-Unis, du Canada et de l’Allemagne, ont également participé à la cérémonie d’ouverture vendredi, arborant une bannière « Diplomates for Equality » sur une scène installée sur la Seoul Plaza. Diplomats for Equality est un mouvement de diplomates présent dans le monde entier pour soutenir la communauté LGBT. « Célébrer la diversité et promouvoir l’égalité des droits pour tous – ce soir lors de la cérémonie d’ouverture du festival coréen Queer Culture ! », a publié l’ambassade d’Allemagne sur son compte Facebook vendredi. Jeudi, l’ambassade américaine a pendu un drapeau arc-en-ciel bien visible au fenêtres de son immeuble. « L’ambassade est fière d’afficher le drapeau « Pride » aux couleurs d’un arc-en-ciel dans une manifestation de solidarité avec les organisations des droits de l’Homme et de la société civile en République de Corée et dans le monde, qui font la promotion des droits fondamentaux des personnes LGBTI ».
Un festival à dimension politique
Le président du Justice Party (parti de l’opposition mineure), Lee Jeong-mi, a également participé au défilé samedi. C’était la première fois que le président d’un parti politique participe au festival, selon le Parti. « La communauté LGBT est confrontée à toutes sortes de violence et de discrimination dans cette société », a déclaré Lee. «Nous devons les protéger de cette violence, comme un acte de véritable amour et de paix. Je ferai de la Corée le deuxième pays en Asie à légaliser le mariage pour les couples de même sexe.» Pour preuve, le Justice Party vient d’ailleurs d’élire Jeong Hye-yeon, qui avait révélé son homosexualité l’année dernière, en tant que chef adjoint du parti de l’opposition mineure. C’est le premier exemple connu d’un politicien membre d’une minorité sexuelle qui se joint à la direction d’un parti politique en Corée du Sud. Les groupes de minorités sexuelles ont salué l’élection de Jeong, exprimant l’espoir qu’elle aidera à réduire les préjugés et les difficultés auxquels ceux-ci sont confrontés.
Mais un festival encore contesté
Un homme habillé comme Jésus devient le symbole du festival
Une image ironique a fini par incarner le Festival de la culture Queer coréenne (KQCF) de cette année. Debout devant une ligne de manifestants chrétiens portant une bannière « L’homosexualité est le péché ! Retournez à Jésus ! » se tient un homme blanc barbu en robe, habillé comme Jésus, tenant un signe de couleur arc-en-ciel et la phrase « Cela ne me gêne pas ». L’image est devenue virale par sa capacité à capter l’imagination des gens de par sa symbolique face aux manifestants. Dans un article publié dans le Korea Times, Evans, l’homme habillé comme Jésus témoigne: « Je suis convaincu qu’il est important de défendre l’égalité et les droits de l’Homme, et les droits LGBT sont des droits de l’Homme ». Pour le festival de cette année, il voulait faire quelque chose pour « diminuer l’effet des manifestants remplis de haine ». Élevé dans une famille catholique mais s’identifiant en tant qu’humaniste laïque, il a choisi de s’habiller comme Jésus pour faire passer un message d’amour et de paix. « Je voulais que mon message soit concis, simple et en juxtaposition à celui des manifestants tout en soutenant mes nombreux amis LGBT », a-t-il déclaré. Evans est un photographe américain originaire d’Atlanta mais qui vit dans la capitale sud-coréenne depuis quatre ans, et c’est son expérience en tant que citoyen étranger en Corée du Sud qui lui ont fait réaliser que « la Corée a encore un long chemin à parcourir en termes de droits et d’acceptation. Mais je suis content de voir et de faire partie des petites étapes dans la bonne direction. Chaque année, la Gay Pride prend de l’ampleur, les protestations se réduisent, et la longue route vers l’égalité devient un peu plus courte ».
Image : Korea Queer Culture Festival 2014, By Piotrus, CC BY-SA 3.0