De nouvelles informations sur la responsabilité française dans l’exécution du génocide contre les Tutsis ont été découvertes grâce à la déclassification des archives de la présidence française relatives au Rwanda, entre 1990 et 1995.
L’article qui date du 19 juin est écrit par Mehdi Ba, correspondant à Dakar pour le site pan-africain francophone Jeune Afrique. Ces révélations seront publiées en détail le 28 juin dans la revue XXI, co-fondée par Patrick de Saint-Exupéry, ancien reporter au Figaro, qui a couvert pour le journal l’opération Turquoise en Juin 1994. ll milite pour faire connaître l’ampleur de la responsabilité française dans le génocide contre les Tutsis.
Un haut-fonctionnaire français qui a eu l’autorisation de consulter ces documents sensibles, déclassé en avril 2015, révèle ainsi que les militaires agissant lors de l’opération Turquoise avaient eu pour ordre de « réarmer les Hutus qui franchissaient la frontière » entre le Rwanda et l’ex-Zaïre. Pourtant, un embargo sur les armes au Rwanda avait été décidé par les Nations-Unis depuis mai 1994 à la suite de l’exécution du génocide contre les Tutsis depuis Avril 1994. Ce génocide, perpétré par des Hutus ordinaires, a été préparé et coordonné par le gouvernement intérimaire du Rwanda, majoritairement composé de suprémacistes Hutus.
Ces découvertes sont publiées alors que les relations Franco-Rwandaises sont tendues depuis plusieurs années. Les relations diplomatiques avaient été rompues entre 2006 et 2008, lorsque le juge français Bruguière a accusé Paul Kagame, actuel président du Rwanda, d’être responsable de l’attentat contre l’avion de l’ancien Président Habyarimana, qui donna le coup de signal du génocide contre les Tutsis le 6 avril 1994.
Mais le cœur de la crispation entre les deux pays vient des accusations du gouvernement Rwandais contre la France. Une liste des personnalités politiques françaises les « plus impliquées dans le génocide » (dont François Mitterrand et certains membres du gouvernement ou du Quai d’Orsay à l’époque) a notamment été publiée en 2008.
La France, alliée du gouvernement suprémaciste Hutu pendant le génocide, est accusée d’avoir protégé les génocidaires au détriment des Tutsis lors de ses deux interventions au Rwanda en 1994. L’opération Turquoise en particulier est extrêmement critiquée par le gouvernement Rwandais, puisque certains acteurs sont accusés de complicité dans le génocide.
En avril 2014, le Président du Rwanda, Paul Kagame, accuse la France d’avoir eu un « rôle direct (…) dans la préparation politique du génocide et la participation de cette dernière à son exécution même ».
Suite à cette déclaration, la France annula sa présence aux commémorations du vingtième anniversaire du génocide contre les Tutsis. La France a officiellement nié ces allégations, d’où les tensions actuelles entre les pays, et l’importance des révélations issues des archives françaises qui pourraient permettre de prouver les accusations portées à l’encontre de la France. Les enjeux sont notamment importants pour les survivants du génocide au Rwanda et en France, qui espèrent ainsi éclairer cette page de leur histoire.
Image: Soldat français lors de l’Opération Turquoise, by SSGT Andy Dunaway